La police dans la rue... pour manifester, ce n'était pas arrivé depuis quinze ans. Syndicats et corps de métier étaient tous rassemblés le mercredi 14 octobre 2015, place Vendôme. Le signe d'un vrai malaise. En tout, ils étaient 7 500 sous les fenêtres de Christiane Taubira pour "demander des comptes à la justice".
Dans le viseur des forces de l'ordre, les permissions de sortie accordées à des délinquants multirécidivistes. C'était le cas de ce braqueur qui a grièvement blessé, le 5 octobre, un policier de la BAC (Brigade anticriminalité). Le jour où ses collègues manifestaient devant le ministère de la Justice, le fonctionnaire était toujours entre la vie et la mort (il est sorti de l'hôpital le 2 novembre).
Des permissions de sortie trop facilement accordées ?
"Si la loi ne répond pas à l'actualité, il est temps de la modifier", estimait un manifestant arborant drapeau et logo Unité SGP Police-FO lors de ce nouvel épisode de la guerre police-justice, où la deuxième est régulièrement accusée de laxisme. Le Premier ministre, Manuel Valls, a fait plusieurs annonces le 14 octobre, allant dans le sens de la fin des permissions "sans nécessité avérée". Les évasions lors de ces permissions sont-elles fréquentes ? Sont-elles distribuées trop facilement − les juges en accordent chaque année près de 50 000 − ou bien aident-elles réellement à la réinsertion ?
Quand des criminels sont laissés en liberté sous couvert de prescription, c'est le code pénal qui se retrouve au banc des accusés. Dix ans après les faits, les crimes restent impunis même si les coupables sont finalement découverts, c'est la loi. Faute d'avoir pu porter plainte à temps, certaines victimes voient ainsi parfois leurs agresseurs vivre tranquillement à côté de chez elles.
Si la justice n'enferme pas tous les coupables, le délai de prescription n'est pas seul en cause : de plus en plus de tribunaux, saturés, n'ont plus les moyens de juger certains crimes. Manuela Gonzalez, la "Veuve noire" déjà condamnée à trente ans de réclusion pour le meurtre de son mari, a été libérée faute de "délai raisonnable" pour fixer la date de son procès en appel. En attendant, elle a pu reprendre un travail et une vie normale, à proximité des familles de ses supposées victimes.
"Complément d'enquête" sur ces criminels qui évitent la prison.
Vidéo : Complément d'Enquête - Justice, des criminels en liberté !